La séduction n’est pas un crime
En 1753, Pierre Rouffio, marchand, est accusé du rapt de séduction de la fille d’Augustin Cadet, Louise Cadet, alors âgée de 17 ans. Dans ce procès, Rouffio se fait offrir la possibilité d’épouser la plaignante, et ce, même si le procès se déroule en 1753, donc après la déclaration de Marly qui, rappelons-le, interdisait clairement la possibilité d’un mariage comme conclusion d’un procès pour rapt de séduction. Ce dernier refuse et doit donc acquitter la somme de 10 000 livres pour dommages et intérêts envers la victime. Rouffio est aussi banni de la Colonie pour une période de 9 ans. Le conflit entre les familles se termine en 1755 lorsque le frère de Pierre, Joseph Rouffio, épouse Louise Cadet, la victime, laquelle détient une dot considérable. (Voir le procès)
Michel Lecours est accusé de rapt de séduction sur la personne de Marie-Anne Campeau, 20 ans. La victime dit avoir été séduite sous promesse de mariage. Elle dépose une requête pour que Lecours soit convaincu du crime de rapt de séduction et qu’il soit condamné à 2000 livres de dommages et réparation civile. La sentence condamne Michel Lecours à prendre en charge l’enfant et à payer, entre autre, 30 livres pour ses frais et 800 livres de dommages. Ce qui est intéressant dans cet exemple, c’est que la plainte déposée évoque à la fois un crime qui relève du criminel, mais souhaite recevoir une sentence qui relève du civil. (Voir le procès)
Un autre exemple qui confirme l’ambigüité entourant le rapt de séduction est le procès de Nicolas Lemoyne. Catherine Paulo, mère d’Élizabeth Campeau, 18 ans, porte plainte contre Nicolas Lemoyne, 35 ans, pour avoir « ravi, subordonné, extorqué par séduction » sa fille, selon l’article 42 du code, c’est-à-dire l’ordonnance de Blois. Encore une fois, la question de la promesse de mariage est présente. Par contre, cette fois aucune compensation n’est versée à la mère puisque sa réputation est mise en jeu (elle aurait eu deux amants), donc seulement une sentence pécuniaire prévue pour l’enfant qui doit être séparée entre les deux amants. (Voir le procès)